Compte rendu de l’entretien avec Mme Anne Courrèges,

conseillère Education à l’Elysée

Date : Lundi 14 octobre 2013

Lieu : Résidence Marigny, près du Palais de l’Elysée

Personnes présentes :

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  • Mme Anne Courrèges : conseillère Education à l’Elysée ;
  • Mme Prisque Nkuni K. : fondatrice et vice-présidente de l’association Coparenf (Collectif de parents et d’enfants contre le décrochage scolaire), présidente de l’association Amicale des locataires ZAC 1 et 2 de La Courneuve ;
  • Mme Danièle Dholandre : membre de Coparenf ;
  • Stéphane Miet : membre de Coparenf.

Etat des lieux :

Un constat alarmant : 140 000 jeunes de 15-19 ans déscolarisés chaque année !

Réduire le décrochage scolaire, l’une des cinq priorités du ministère de l’Education nationale. Le constat est alarmant selon le diagnostic national : 140 000 jeunes quittent chaque année le système scolaire sans diplôme ou qualification ; autrement dit, aujourd’hui, 16 % des jeunes de 15 à 19 ans ne sont pas scolarisés. Ils n’étaient que 11 % en 1995. L’objectif fixé par le président de la République François Hollande est de diminuer ce nombre de moitié, à la fin du quinquennat.

L’association Coparenf, Collectif de parents et d’enfants contre le décrochage scolaire, s’est donc fixé quelques objectifs et stratégies pour aider le Gouvernement à lutter contre ce phénomène qui est devenu plus qu’une réalité dans notre pays (dans nos villes et quartiers populaires), en particulier dans le département de la Seine-Saint-Denis. En mettant tout particulièrement un accent sur le rôle de la parentalité dans la réussite éducative et sociale
de l’enfant.

Pourquoi la Parentalité ? Tout simplement parce ce que tout commence dans la famille, la famille étant un équilibre, une assurance, une racine pour chaque enfant.

Déroulement de l’entretien :

I- La parentalité au cœur du projet de Coparenf

Mme Anne Courrèges (photo ci-contre), conseillère Education auprès du président de la République, François Hollande, a reçu les trois personnes représentant l’association Coparenf à la Résidence Marigny (celle-ci accueille régulièrement les chefs d’Etat, hôtes du Président). « Mettons les choses au clair tout de suite, nous sommes bien d’accord que ce n’est pas une réunion de travail », a précisé d’emblée Mme Courrèges. « Nous n’avons qu’une vue générale des difficultés rencontrées dans l’Education », a-t-elle avoué en préambule. Nous sommes d’autant plus intéressés par les idées que vous pouvez apporter pour résoudre ces problèmes localement. »

 

Mme Prisque Nkuni K., fondatrice et vice-présidente de Coparenf, a ensuite présenté succinctement la jeune association (créée le 10 avril 2013) et ses objectifs. Elle a informé
Mme Anne Courrèges que « Coparenf se [concentrerait] sur les problèmes de décrochage scolaire, du recul de l’autorité parentale, de l’autorité en général, et [s’attaquerait] aux causes de l’insécurité telles que l’injustice sociale et la discrimination territoriale :

  • en donnant plus de poids à la parentalité dans les écoles, collèges et lycées, c’est-à-dire en contribuant à une bonne relation entre parents, enfants et enseignants ;
  • en repérant les absences et en établissant un lien entre parents, enseignants, élus et services socio-éducatifs ;
  • en offrant une orientation individualisée pour chaque enfant en décrochage scolaire ;
  • en donnant à l’enfant les moyens de s’exprimer (urgent pour permettre à l’enfant en décrochage intérieur – manque de confiance en soi – et scolaire de s’extérioriser) ;
  • en valorisant les savoirs et la volonté de l’enfant, tout en veillant à son mieux-être dans sa différence, etc. »

« Le décrochage scolaire commence dès la maternelle, les enfants connaissent des problèmes d’apprentissage dès cet âge-là », a précisé Mme Prisque Nkuni K. « Il faut donner aux enfants l’envie d’aller à l’école ! », a-t-elle insisté. Mme Anne Courrèges a écouté attentivement les solutions énumérées par la fondatrice de Coparenf. « On va beaucoup travailler sur la parentalité car tout commence dans la famille, qui est un équilibre, une assurance, une sécurité et une racine pour chaque enfant », a proposé Mme Prisque Nkuni K., avant d’informer sur l’existence d’un atelier « Alphabétisation » dans le cadre de l’Amicale des locataires ZAC 1 et 2 de La Courneuve qu’elle préside. « Cet atelier, où des professionnels donnent des cours à des femmes, reprendra en novembre », a-t-elle précisé.

Par ailleurs, M. Stéphane Miet a parlé de son expérience de formateur-animateur d’un atelier « Journalisme » dans deux écoles publiques parisiennes, dans le cadre des nouveaux rythmes scolaires mis en place en cette rentrée 2013. L’occasion d’informer Mme Anne Courrèges de son « vécu sur le terrain avec certains élèves de CM1 et CM2 qui éprouvent encore, à l’âge de 9-10 ans, des difficultés de compréhension et de lecture ».

Et Mme Prisque Nkuni K. d’enchaîner : « Comment allons-nous nous attaquer au recul de l’autorité parentale ? En créant, notamment, un groupe de femmes-relais par le dispositif du contrat d’adulte-relais. Ces médiatrices socioculturelles permettront d’améliorer le lien social entre les différentes parties, en réglant notamment les conflits de la vie quotidienne. » Avant de proposer les solutions envisagées par l’association Coparenf :

  • l’organisation des groupes d’écoute entre parents, enfants, enseignants et élus sur les questions liées à l’éducation de l’enfant ;
  • la dispense de formations aux parents ou des conférences-débats avec la participation d’universitaires et de professionnels en lien avec les enfants
    (ex. le président du tribunal pour enfants de Bobigny, M. Jean-Pierre Rosenczveig et avec les Universités populaires de parents – UPP) ;
  • la mise en place d’une Chorale parents-enfants afin de valoriser la diversité culturelle à travers chants et musiques ;
  • l’organisation, par exemple, des modes de garde d’enfants lors des activités ;
  • l’organisation d’activités parascolaires telles des sorties culturelles (ex. musées, médiathèques…), etc.

Avant de préciser l’ambition de Coparenf qui, au final, est « la réussite sociale, dans le cadre d’une politique d’intégration et de cohésion sociale. D’où notre idée aujourd’hui de demander le soutien et l’appui du Gouvernement ».

 

 

II- « Trouver des petites stratégies contre la déscolarisation »

 

Qu’attend concrètement l’association Coparenf du Gouvernement à travers une demande de soutien et d’appui de son projet de lutte contre le décrochage scolaire ?
Mme Prisque Nkuni K. a demandé le soutien du Gouvernement pour la création de 4 postes de femmes-relais. Avant de préciser que « le Gouvernement pourrait appuyer les actions de Coparenf en demandant au préfet de la Seine-Saint-Denis un accompagnement dans ce projet par la création de postes en contrat d’adulte-relais, dispositif soutenu financièrement par le budget de l’Etat, le CUS (convention d’utilité sociale), qui est à la disposition de l’agglomération Plaine Commune ». A cette occasion, la vice-présidente de Coparenf a remis à la conseillère Education de l’Elysée une copie de la réponse du service de la Cohésion sociale de la Préfecture de la Seine-Saint-Denis ainsi qu’un dossier complet présentant l’association (statuts, bulletin d’adhésion, modèles de lettres envoyées aux écoles élémentaires…).

 

Mme Anne Courrèges rappelle « les difficultés financières auxquelles est confronté l’Etat en ce moment ». Avant de préciser : « Il faudrait plutôt s’adresser aux collectivités locales pour espérer obtenir des subventions. » Mme Prisque Nkuni K. lui a répondu ceci : « La Mairie de La Courneuve vient d’octroyer un local à Coparenf et veut bien nous accompagner, mais n’ayant pas de financement, ils ne peuvent aller au bout de leur volonté car c’est un projet ambitieux qui nécessite un financement. » Et d’ajouter que « Coparenf, dans sa volonté d’aider les jeunes de La Courneuve à retrouver l’espoir, n’a pas de moyens financiers. Depuis 4 ans, en effet, nous travaillons bénévolement sans bénéficier d’aucune aide de l’Etat. Pourtant, nos actions sont bien visibles et concrètes. De plus, toutes les femmes qui m’accompagnent dans mes actions sont des demandeurs d’emploi et ne se découragent jamais lors de nos actions bénévoles, raison pour laquelle nous venons demander l’intervention et l’appui du Gouvernement ».

Mmes Prisque Nkuni K. et Danièle Dholandre ont précisé en chœur que l’association avait déjà sollicité les collectivités locales pour une aide financière, mais en vain pour l’instant. « L’Education n’est-elle pas la priorité du Gouvernement ? », a interrogé M. Stéphane Miet. Et s’adressant à Mme Anne Courrèges : « Les paroles doivent désormais être suivies d’actes concrets, les associations ont réellement besoin d’aide… » Avant de citer l’illustre écrivain du XIXe siècle Victor Hugo : « Celui qui ouvre une porte d’école, ferme une prison. »

Mme Prisque Nkuni K. a insisté sur la nécessité de « trouver des petites stratégies pour aller chercher les décrocheurs ». Une bien belle formule saluée et notée aussitôt par la conseillère Education auprès du président de la République. D’où, à l’avenir, la mise en place par Coparenf de plusieurs ateliers associant parents et enfants (exemples d’ateliers : lecture, cuisine…).

« Qu’allez-vous faire de toutes les idées que nous vous soumettons pour lutter contre le décrochage scolaire ? », a demandé Mme Danièle Dholandre. Mme Anne Courrèges a accueilli avec bienveillance le projet ambitieux de Coparenf en promettant, notamment, «  de transmettre [nos] demandes auprès de l’Inspection académique ».

 

Mme Prisque Nkuni K. a rappelé avec émotion son parcours personnel avant de défendre ardemment le projet de Coparenf : « Madame Courrèges, je vous demande humblement de me permettre d’accomplir mon rêve de contribuer à la richesse de la France en valorisant ces jeunes pépites, ces jeunes dont les compétences contribueraient à la richesse économique de mon pays d’adoption : la France […] j’ai Osé mettre ce projet en place. Donnez-moi la force de l’accomplir avec amour et plus d’ambition ! J’aime la France ! La France m’a beaucoup donnée. » Avant de conclure : « Permettez-moi enfin de lui redonner un peu de ce qu’elle m’a offert par la mise en place de ce projet ! »

 

Depuis l’entretien avec Mme Anne Courrèges, conseillère Education à l’Elysée, l’association Coparenf continue de recevoir des soutiens et devrait prochainement s’entretenir avec d’autres personnalités afin d’obtenir un appui moral et, surtout, des aides financières.
En gardant bien à l’esprit sa devise : « Le décrochage scolaire n’est pas une fatalité mais une réalité. Ensemble, parents, enfants, professionnel(le)s, élu(e)s, attaquons-nous aux causes pour une meilleure prise en charge ! »

 

 

 

 

 

 

Compte rendu de l’entretien avec Mme Anne Courrèges, conseillère Education à l’Elysée